L’Information scientifique et technique au Sénégal : un problème vieux de 50 ans
Vers les années 1960, l’UNESCO s’était lancé dans une vaste étude sur l’organisation générale de l’Information scientifique et technique (IST). C’est durant cette période que des experts du Sénégal et de l’organisation ont commencé à se pencher sur la question. Il était apparu vers ces années que « si le Sénégal disposait d’un potentiel documentaire scientifique et technique extrêmement riche, susceptible de couvrir largement les besoins des utilisateurs, on devait observer un certain manque d’organisation sur le plan du traitement de la documentation nationale et une sous-exploitation de l’Information scientifique et technique internationale stockée au Sénégal »[1].
Les recommandations issues de la réunion de la Conférence des ministres des États africains (CASTAFRICA)[2] chargés de l’application de la science et de la technologie au développement tenue à Dakar en janvier 1974 peuvent être considérées comme les premiers actes concrets pour la valorisation de l’Information scientifique et technique. C’est à l’issue de cette réunion que la Délégation générale à la Recherche scientifique et technique (DGRST) va réunir en mai 1974 pour la première fois la commission nationale “Documentation scientifique et technique” (DST) constituée par le Premier ministre. Pendant la même année, un expert désigné par l’UNESCO entreprenait une “Étude de faisabilité d’un Centre national de documentation scientifique et technique“. Le 14 avril 1975, le Conseil interministériel de la recherche scientifique et technique décidait la création du Centre national de documentation scientifique et technique (CNDST). La requête transmise par le Gouvernement au Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) le 17 juin 1975 pour le financement du projet de création du centre fut approuvée et le projet pût démarrer en janvier 1976. Depuis, le contexte a beaucoup changé à cause des nouvelles technologies et l’IST reste plus que jamais une priorité pour le Sénégal.
Suite au Conseil présidentiel sur l’Enseignement supérieur et la recherche tenu le 14 août 2013, une nouvelle dynamique s’est instaurée pour réhabiliter les missions du CNDST. Pour le Sénégal, l’identification, l’accès et la diffusion de l’IST produite sur le pays et par le pays doivent figurer en haut des priorités. L’information scientifique et technique la plus utile pour le Sénégal est en effet celle produite par et pour ses citoyens. C’est celle-ci qui en effet répond plus à ses réalités, à ses besoins et contribue dès lors plus facilement à son développement économique.
Avant l’avènement du numérique, le Sénégal accordait déjà une place importante à l’information scientifique dans son développement. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont aujourd’hui permis une production massive de connaissance et facilité en même temps l’accès à celle-ci. Les vecteurs de l’IST, en premier lieu les revues, puis les livres, rapports, conférences ou thèses, remplissent les fonctions élémentaires définies depuis bientôt 352 ans malgré la mutation profonde qu’a connue le monde de la documentation scientifique. Grâce aux NTIC et au développement des archives ouvertes, l’accès et la diffusion de l’Information scientifique sont devenus faciles. L’ère du numérique écarte tous les prétextes liés à la circulation du savoir, à la vulgarisation et valorisation du patrimoine scientifique du Sénégal. Les compétences et les ressources pour relever ces défis sont aujourd’hui disponibles dans le pays.
Vers une nouvelle dynamique
Le 22 juin 2016 s’est tenu à l’hôtel Faidherbe à Dakar un atelier sur la « Valorisation des résultats de la recherche pour un Sénégal émergent », organisé par la Direction générale de la Recherche du Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’innovation. L’objectif de cet atelier qui a réuni tous acteurs concernés (administrations, universités, centres de recherche, secteur privé, société civile) était d’échanger, partager sur les politiques publiques et les pratiques institutionnelles de valorisation des résultats de la recherche. Le concept de « valorisation des résultats de la recherche » est multidimensionnel. Le contenu varie suivant les acteurs impliqués, leurs attentes et leurs intérêts. Pour nous, il s’agira de réfléchir sur deux plans fondamentaux : la valorisation scientifique et la valorisation sociale.
La valorisation scientifique : elle profite aux chercheurs et à leur institution de rattachement. Il s’agira d’améliorer leur visibilité scientifique. Les publications scientifiques dans les revues spécialisées, les communications lors des conférences et séminaires, posters, fiches, etc. sont traditionnellement les canaux utilisés. L’objectif est donc de contribuer à la circulation des idées et au développement de la science ou à l’amélioration de la visibilité et la crédibilité du chercheur individuel, des équipes de recherche ou de la recherche nationale dans son ensemble.
Quant à la valorisation sociale, elle traduit une forte volonté de décloisonner la recherche scientifique. En effet, une participation créatrice et le développement de la démocratie dépendent aussi bien d’une éducation satisfaisante que d’un accès libre et illimité à la connaissance, la pensée, la culture et l’information. Tel est d’ailleurs le préambule du manifeste de l’UNESCO sur les bibliothèques publiques devenues ubiquitaires, c’est-à-dire des espaces à la fois accessibles physiquement et virtuellement[3].“La Liberté, la prospérité et le développement de la société et des individus sont des valeurs humaines fondamentales. Elles ne peuvent s’acquérir que dans la mesure où les citoyens sont en possession des informations qui leur permettent d’exercer leurs droits démocratiques et de jouer un rôle actif dans la société.” La valorisation sociale permet donc de répondre à la demande sociale des citoyens. Pour le dire d’une autre manière, elle permet d’améliorer les conditions de travail et de recherche des populations cibles, de mieux les éduquer, les doter d’outils (savoirs endogènes et scientifiques) pour une ouverture sur le monde. Pour cela l’IST doit être vulgarisé en la présentant sous forme format (vidéo, images, son).
Objectifs et démarches du projet
Objectifs
Le projet s’inscrit dans une démarche de valorisation du patrimoine scientifique du Sénégal.
Les objectifs stratégiques ou intermédiaires peuvent se décliner en trois points :
- rendre accessible ce patrimoine scientifique afin d’offrir à nos chercheurs et institutions de recherche une meilleure visibilité scientifique tant sur le plan national qu’international;
- offrir aux citoyens un accès à l’information qui leur permet d’exercer leurs droits démocratiques et de jouer un rôle actif dans la société;
- assurer la disponibilité des statistiques relatives à la recherche
Démarche méthodologique
À partir de là, les objectifs spécifiques se déclinent ainsi qu’il suit :
- mobiliser les acteurs principaux (chercheurs, professionnels de l’information, agents de l’Etat et du privé) pour aboutir aux résultats attendus ;
- avoir l’accord de principe et signer les conventions avec les institutions cibles ;
- identifier, collecter et traiter toute la littérature grise des institutions de recherche du pays ;
- Dématérialiser les documents sous format papier ;
- créer et alimenter une interface (base de données) commune afin de faciliter l’accès à ce patrimoine scientifique ;
- faire connaître au grand public l’existence de la plateforme et les inciter à exploiter le dispositif ;
- évaluer l’impact du dispositif mis en place