La recherche scientifique reste l’un des parents pauvres du système éducatif en Afrique bien que les autorités reconnaissent son importance pour le développement du continent.
Cela n’empêche pas de nombreux pays africains à l’image du Sénégal de promouvoir des projets ou de rejoindre des initiatives visant à booster la recherche scientifique au plan national et régional.
C’est dans ce cadre que le pays a rejoint l’Initiative des conseils subventionnaires de la science en Afrique subsaharienne (SGCI) en 2015. Le Sénégal est l’un des 15 États membres de cette initiative à laquelle participent quatre pays d’Afrique de l’Ouest.
Tout comme la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Burkina Faso au niveau sous-régional, le Sénégal participe aux différentes activités et formations de cette initiative autour des quatre composantes clés du projet.
Le programme a renforcé les capacités des bénéficiaires sénégalais dans plusieurs domaines en lien avec la science, la technologie et la gestion de la recherche. A cela s’ajoute la conception et le suivi des programmes, l’évaluation et l’apprentissage basés sur l’utilisation d’indicateurs solides.
L’un des aspects de l’accompagnement favorise aussi l’échange de connaissances avec le secteur privé et la promotion de partenariats entre le Conseil national des subventions scientifiques sénégalais et d’autres acteurs du système scientifique tant au niveau local qu’international.
Professeur Soukèye Dia Tine, directrice du financement de la recherche et du développement technologique au Ministère sénégalais de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI), souligne que la SGCI est une initiative considérée comme essentielle pour quiconque s’intéresse à la recherche scientifique, à l’économie et au développement du continent.
“Nous apprécions les quatre composantes clés du projet et en particulier l’aspect collaboratif de cette Initiative tant au niveau national parmi les chercheurs sénégalais qu’au niveau continental avec les chercheurs et les organismes de financement de la recherche d’autres pays”, a-t-elle déclaré.
La collaboration sud-sud dans la recherche
L’Initiative des conseils subventionnaires de la science en Afrique subsaharienne (SGCI) a renforcé la coopération sud-sud en matière de recherche scientifique entre les pays d’Afrique subsaharienne au cours de ces cinq dernières années grâce à différents voyages d’étude.
Le Sénégal et le Burkina Faso ont ainsi saisi cette occasion pour trouver un terrain d’entente et travailler ensemble sur deux projets scientifiques d’un grand intérêt humain pour les deux pays.
La première équipe de chercheurs a travaillé sur un projet de santé intitulé “Comment améliorer la gestion multisectorielle des maladies chroniques chez les populations du Burkina Faso et du Sénégal“.
Cette recherche-action menée par les détenteurs des enjeux stratégiques de la gestion des maladies chroniques présente d’importantes similitudes dans les deux pays.
La deuxième équipe a concentré ses travaux sur un projet environnemental dans la région de Kaolak (sud-est du Sénégal) sur “l’aménagement des terres salées pour aider à améliorer la vie des populations vulnérables dans le contexte du changement climatique en Afrique de l’Ouest“.
Des chercheurs de différentes disciplines et universités ont pu ainsi travailler dans les mêmes équipes de recherche.
La recherche scientifique collaborative reste quelque chose de difficile dans certaines universités où les chercheurs avaient l’habitude de mettre en œuvre leurs projets indépendamment ou avec d’autres chercheurs dans le même domaine d’étude.
Cependant, grâce à ces deux projets transnationaux, des sociologues, anthropologues, médecins, économistes de la santé et géographes du Sénégal et du Burkina Faso ont pu facilement partager leurs connaissances et mettre en œuvre leurs projets de recherche.
“La plupart des projets de recherche scientifique en Afrique concernent des problèmes transfrontaliers ou transnationaux car les pays africains partagent les mêmes problèmes au niveau de la santé, au plan environnemental et économique”.
“Pourquoi devons-nous travailler uniquement au niveau national sur les mêmes problèmes de développement si nous pouvons trouver une solution pour nos différents pays en travaillant ensemble ?” s’interroge professeur Soukèye Dia Tine.
Les projets financés par la SGCI au Sénégal et au Burkina Faso sont le début d’une réponse à long terme à cette question, non pas seulement pour la recherche fondamentale, mais aussi pour faire face aux problèmes financiers.
En réalité, il y a un manque de ressources pour le financement de la recherche scientifique et l’innovation au Sénégal, comme dans la plupart des pays africains.
L’approche du Sénégal est donc de continuer d’œuvrer pour une meilleure collaboration sud-sud qui permettra de mieux utiliser des ressources – souvent limitées – pour obtenir de meilleurs résultats.
L’expérience avec le Burkina Faso pourrait aboutir à une collaboration sur le long terme visant à mieux utiliser les ressources des deux pays pour financer des projets de recherche transnationaux.
La coopération Sud-Sud ouvre également des opportunités et le Sénégal veut la promouvoir afin de trouver de nouveaux partenariats au niveau international.
C’est déjà le cas avec le Japon. Le Sénégal a rejoint l’AJ-COR, Africa-Japan Collaborative Research, pour des projets de recherche dans le domaine de l’environnement.
Les difficultés liées au financement de la recherche
Le Sénégal continuera à bénéficier des quatre composantes de l”Initiative des conseils subventionnaires de la science en Afrique subsaharienne (SGCI) alors que la deuxième phase du projet est prête à démarrer.
Au cours de la première phase, les fonds de recherche étaient gérés par des organisations internationales en relation direct avec les équipes de recherche.
Dans cette deuxième phase, le Conseil national des subventions scientifiques, le FIRST (Fonds d’impulsion de la recherche scientifique et technique), sera responsable de la gestion des fonds, de l’organisation et de la gestion des appels à propositions.
Il est important de noter que l’organisme national de financement de la recherche du Sénégal est la Direction du financement de la recherche scientifique et du développement technologique.
Cette direction est placée sous l’autorité du directeur général de la recherche et de l’innovation.
Cependant, le FIRST, bien que le plus connu et le plus important en termes de budget, n’est qu’un des divers mécanismes ou outils utilisés par la Direction du financement de la recherche scientifique et du développement technologique pour financer la recherche scientifique au Sénégal.
Actuellement, le Sénégal ne finance que 15 à 20 projets chaque année par le canal du FIRST avec un fonds d’environ 522 000 dollars.
Chaque proposition sélectionnée reçoit autour de 35 000 dollars. Il existe également un fonds supplémentaire de 260 000 dollars consacré au soutien scientifique et technique, mais uniquement pour les projets et initiatives des femmes chercheurs.
L’univers de la recherche scientifique reste un univers assez compétitif avec des ressources bien souvent limitées mais où il est nécessaire de cultiver légalité des chances.
Le Ministère sénégalais de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) a donc mis en place un mécanisme de financement solide, basé sur la transparence, la bonne gouvernance et la redevabilité.
L’Initiative des conseils subventionnaires de la science en Afrique subsaharienne (SGCI) a également insisté sur ces points dans la gestion de la recherche scientifique.
La preuve, c’est que les équipes de chercheurs qui ont bénéficié des subventions devaient non seulement gérer leurs activités de recherche, mais aussi rendre compte de l’utilisation des ressources attribuées.
Pour Professeur Soukèye Dia Tine, le Sénégal doit pouvoir améliorer la quantité et la qualité de la recherche scientifique.
Elle espère que pour la “deuxième phase de l’Initiative SGCI, le FIRST recevra davantage de propositions de haute qualité visant à résoudre efficacement les problèmes auxquels la population sénégalaise est confrontée”.
Bien entendu ces propositions devront une fois de plus mettre en évidence et promouvoir l’aspect collaboratif au niveau de la recherche.
Source : BBC : https://www.bbc.com/afrique/region-54307781